Arnaud était contor de Nant et seigneur de Roquefeuil. La gloire des armes rehaussait l'éclat de sa noblesse. En 1346, sous la conduite du duc de Bourbon, il avait combattu,en Agenois, contre les Anglais, ayant sous ses ordres deux chevaliers, 71 écuyers et 190 sergents. Nous le trouvons encore chargé de la défense du Rouergue, en 1369, pendant la guerre de Gascogne, concurremment avec Guillem de Roquefeuil, tous deux écuyers bannerets, ayant à leur solde l'un 28 écuyers, l'autre dix-neuf. (H. G. L., t. VII, passim). On sait la douloureuse circonstance qui amena Arnaud au Pouget. Le seigneur de Roquefeuil prit possession de sa nouvelle baronnie, en 1350. Bernard de Saint-Privat, nanti de sa procuration datée du 23 avril, présenta à Guy de Capluc, commis à la garde du Pouget, l'ordonnance royale en vertu de laquelle Arnaud devait recouvrer toits ses droits. Guy de Capluc cassa tout ce qui existait, donna congé à tous les officiers établis par lui au nom du Roi, reconnut Arnaud comme seul maitre légitime de la Baronnie et lui restitua tous les fruits dont il avait été privé pendant le séquestre. Bernard de Saint-Privat se rendit alors dans la cour du chateau, déclarant qu'au nom du sieur Arnaud de Roquefeuil il prenait possession de toute la Baronnie du Pouget, et il attacha les armoiries de ce seigneur au mur, sous le portique. Il nomma ensuite baïle le sieur Jean Maurice Arnaud, sergent Jean Tamen et prècon Bernard Blaquière. Le sergent et le précon eurent ordre de faire en six endroits de la ville la proclamation suivante : " manda la cour de Monseigneur de Roquefeuil, seigneur destà villa, que negun home, de qualqua condicion que sia, no aude porter armas devidaitas, sur pena de perdra las armas, et de souassanta soous dounadous au dit sieur " . La prise de possession de Saint-Bauzille et celle de Pouzols eurent lieu, le dernier jour du mois d'avril; celle de Saint-Amans, le 1er mai ; celle de Vendémian quelques jours après, et partout avec le même cérémonial. (Arch. de Lestang). Bientôt les habitants de ces divers lieux durent faire hommage et prêter serment de fidélité au nouveau seigneur. Ceux du Pouget se rendirent, le 10 septembre, dans l'église de Sainte-Catherine. Arnaud était assis sur un banc devant l'autel, tenant un missel ouvert entre ses mains. Les vassaux se mirent à genoux, l'un aprés l'autre, et, la main sur les saints évangiles, promirent d'être bons et fidéles envers leur maitre, sauf leur droit et celui d'autrui. Il se trouva là, pour témoins, Arnald, archidiacre de Valence, Etienne Cardonet, prieur de Saint-Fèlix de Po..., Jean Taillan, archiprêtre du Pouget, Jacques de Saint-Germain.., et le notaire Herbert de Grenelle. Le 16, le seigneur de Roquefeuil reçut le serment de fidélité des hommes de Pouzols dans le cimetière dudit lieu, on présence d'Arnald de Roquefeuil, archidiacre de Valence (le même que plus haut), de noble Jean de Roquefeuil, de Bernard de Saint-Privat et du notaire susdit. Le 18, les gens de Saint-Bauzille jurèrent fidélité au seigneur dans la cour de l'habitation de l'Évêque de Béziers. Le même jour, ceux de Vendémian offrirent leurs hommages sur la place publique le sieur de Roquefeuil était assisté de Dalmace, seigneur de Montarnand et d'Anssargues. Quelques habitants du Pouget, ayant terres au terroir de Rouviéges, rendirent honneur dans l'église de Sainte-Marie, en présence de Jean de Narbonne, seigneur de Puy-Lacher, et de Guillaume Alric. Le seigneur de Roquefeuil se transporta, le 11 décembre, au chateau de Montarnaud où se trouvèrent les conseigneurs Dalmace Dalmace, Bertrand de Mugolêne, Brémond ….. , Rayrnond de Pradines, Rostaing de Montaut, Déodat Dalmace et Bertrand Azemar. Arnaud, comme seigneur principal, et Dalmace Dalmace, au nom des conscigueurs présents et absents, reçurent le serment des habitants, aprés leur avoir promis de respecter les libertés et franchises dont ils avaient joui jusqu'alors . Du 17 septembre au 18 décembre, Arnaud eut à recevoir les hommages de Jean de Narbonne, époux de Catherine de Roquefeuil et curateur de Guillaume, son père, tombé en démence, pour les terres de Plaissan et Adissan , de Guillaume Delpech ou du Puy pour la terre de Tressan , de Pierre de Montdardier pour le lieu de Lestang. II reçut aussi les reconnaissances de Bérenger, sieur de Clermont et de Canet, pour la barque de ce dernier lieu, de Guillaume de Vernêde, de Bérenger de Quatrecazes, d'Arnaud de Quatrecazes, de Philippe, veuve de Montdardier, tutrice des enfants de Bérenger, de Pierre Sarret, damoiseau, tuteur de son fils, d'Hugues de Gignac, tous seigneurs nobles du Pouget. (Arch. de Lestang). Le lieu de Popian était, à ce moment, administré par Peautric ou Peltrie, que Raymond Pierre de Ganges, dit-on, avait substitué par son testament de 1348 à sa femme, Guillaumette de Montpeyroux et à son fils, Guillaume. Il est probable que Peltric avait épousé Guillaumette après la mort de son mari, et que la veuve lui avait sacrifié les droits de son fils en méme temps qu'elle lui avait cédé les siens Peltric était à la tète de Popian, puisque le sieur de Roquefeuil exigeait son hommage. Peltric refusa de se reconnaître le vassal du sieur Arnaud se fondant sur ce que dans l'accord fait entre le seigneur de Popian et le roi dAragon, en 1204 il avait été stipulé que le lieu de Popian ne serait jamais détaché du domaine des seigneurs de Montpellier. Le sieur de Roquefeuil fit saisir le chateau de Popian. Il y eut cependant une transaction ou compromis passé le 13 décembre 1352, en vue de soumeltre la question de juridiction à deux experts qui furent noble Gilbert de Crussol pour Peltric, et Guy de Capluc pour Arnaud, dont il était le régisseur ; Arnaud permit à la famille de Peltric de séjourner au chateau jusqu'à la décision des arbitres. Les armes du seigneur de Roquefeuil furent appliquées au manoir seigneurial ; elles y étaient encore en 1353. Peltric ayant obtenu alors des Lettres pour les faire disparaitre, Arnaud l'attaqua au parlement de Paris. Raymond Bernard, procureur du gendarme Arnaud, et Peltric en personne se rendirent à Paris. Peltric fut condamné à replacer les penonceaux du sieur de Roquefeuil sur sa demeure jusqu'à la fin du procès. Cependant il parvint à faire accepter son hommage par le roi de France et à se faire rétablir dans sa terre de Popian. Arnaud fit opposition et put réclamer son droit de commise. Le parle-ment rendit son arrêt définitif on 1355 il ordonna " que Peltric resterait et serait l'homme et le vassal du chevalièr de Roquefeuil, à raison du château de Popian ". Les hommages dus pour les moulins de Carabottes et le ténement de Jourmac nous échappent, mais ils n'en furent pas moins faits par le seigneur évêque de Lodève. Raymond Bernairi, vicaire perpétuel de Saint-Amans-deTeulet, avait reconnu, on 1351, les droits d'Arnaud de Roque-feuil sur ce lieu. Hugues de Vesinio, qui en était le prieur en 1355, s'appuyant sur un titre de 1286, s'inscrivit en faux contre le sieur Arnaud qui réclamait " un plein et entier pouvoir et toute juridiction, le droit de fourches, piliers, perches et prisons, le droit de domaine et de directe, avec l'albergue de 10 hommes ou 20 sols, chaque année, et le serment de fidélité du dit prieur ", prétendant que ses prédécesseurs, les rois de Majorque, avaient joui de toutes ces facultés. Le pricur affirmait posséder l'entiére juridiction on vertu du titre susdit. Tel fut l'accord qui mit un terme au différend qui divisait le seigneur Arnaud et le prieur de Vesinio "Toutes les dépendances de la seigneurie de Saint-Amans seront désormais communes entr'eux. La seigneurie pure et mixte et l'entière juridiction dudit chàteau de Saint- Amans et de son territoire, fourches piliers,perches, condamnations, impositions, bans, inquants et criées, connaissance et exécution des choses susdites seront d'hors en avant communes et indivises, en sorte que ledit de Roquefeuil et ses successeurs auront l'aulre moitié..... ; que la création, institution et ordination baïle, sergent et géolier appartiendront de plein droit audit prieur, et que ceux-ci ne pourront exercer leurs offices jusqu'à ce qu'ils aient prété serment de fidélité entre les mains dudit de Roquefeuil ou de ses délégués...; que les biens (des condamnés) qui seront vendus, sauf le droit du seigneur directe, seront partagés. . ., les pour-suites ayant été faites à frais communs ; s'il y a appel, l'affaire sera jugée de plein droit par le juge d'appeaux du sieur de Roquefeuil les emphytéotes appartiendront à leurs seigneurs comme auparavant…. ledit prieur ne sera pas tenu à payer l'albergue de dix chevaliers et ne sera pas forcé de faire hommage ni de prêter serment de fidélité…. ; le prieur et le sieur de Roquefeuil bâttiront une prison commune dans le lieu de Saint-Amans ou au faubourg " , Le prieur s'engagea à faire ratifier le traité par l'abbé d'Aniane et sa communauté dont il dépendait. L'acte d'accord fut passé à Saint-Bauzille de-la-Sylve, devant nobles et vénérables hommes sieur de Vésinio, chevalier, Bernard de Villeneuve, licencié ès-droits, de Saint-Saturnin, Arnaud de Moutdardier, moine de Saint-Guillem, Guigon de Capluc et autres. (archiv. de Lestang). Le lieu de Lestang attira l'attention d'Arnaud de Roquefeuil, en 1371. Déjà, en 1367, Pierre de Montdardier, qui tenait en fief Lestang, s'étant trouvé dans l'impossibilité absolue de payer 600 florins, qu'il devait à la communauté du Pouget à l'occasion des tailles, avait été autorisé par le Roi, le 9 aoùt, à aliéner 60 sétérées de terrain sis, enpartie, à la Condamine, près le Pouget, et en partie, à Lestang . La situation de Pierre n'était pas devenue meilleure. De nouveaux créanciers firent saisir le domaine entier de Lestang. Ce domaine fut vendu, aux enchères, au prix de 880 florins d'or, à l'un d'entr'eux, Imbert de Montijon. Mais quand ce dernier soumit son acquisition au seigneur du Pouget, Arnaud de Roquefeuil, en vertu de son droit de prélation ou de préférence, déclara retenir la terre pour son compte et remit à Imbert la somme qu'il avait déjà versée. La borie ou métairie de Lestang, composée de la maison d'habitation, de vignes, prés, terres et autres immeubles, avec les droits do tasque, d'usages et de cens dèpendants du fief, fit retour à la Seigueurie du Pouget, le 14 février 1371. Acte en fut dressé, ce jour, à Puy-Lacher, en présence de noble Guigon de Camprinton, Guillaume Ferrand, etc., par Raymond Atgier, notaire. Le sieur Arnaud n'avait usé de son droit de prélation que dans le dessein de récompenser Pierre Guitard, seigneur de Lughanac, à raison des services qu'il en avait reçus, en Agenois, pendant la guerre il lui donna, en effet, la terre de Lestang, en déclarant manifestement qu'il voulait reconnaître ainsi le dévouement de Guitard, et acquérir un nouveau droit aux bons offices des siens pour l'avenir. Il retint cependant toute juridiction sur le lieu de Lestang, et imposa à ses possesseurs, avec l'hommage et la foi, la redevance annuelle de deux quartiers de chevreau payables le jour de la fête de S. André. Il accorda encore au seigneur de Lestang l'autorisation de construire une tour au chàteau et de l'entourer de fossés. Pierre Guitard resta le fidèle vassal d'Arnaud, surveillant de prés les intérêts de son suzerain dans la terre du Pouget, tandis que celui-ci faisait sa résidence habituelle dans le Quercy. Aussi reçut-il une nouvlle preuve de sa gratitude : le 31 mai 1378, Arnaud lui accorda entière juridiction dans l'étendue de la seigneurie de Lestang, en se réservant le droit de supériorité et de ressort. Et comme il existait, en 1381, quelques doutes sur les limites de cette juridiction, il les fit disparaître, le 21 avril, en voulant qu'elle s'exerçât jusqu'au chemin du Pouget à N.-D.-de-Rouviéges, à la condition cependant que les fourches du sieur Guitard ne fussent jamais placées de ce côté ; mais il lui permit de les installer partout ailleurs . La terre de Tressan fut réunie au domaine du sieur de Roquefeuil, en 1384. Guillaume du Puy était mort depuis peu, faisant Adèlaïde, sa soeur, son héritière, et lui substituant Guillaume Durban, seigneur d'Olonzac, son neveu. Adèlaide et son fils vendirent tous leurs droits sur le château de Tressan au seigneur du Pouget pour la somme de 800 liv. tourn., par acte passé à Myndoret, au diocèse de Narbonne, le 30 mai. Le château de Tressan élait soumis à certaines charges, que l'acquéreur accepta pour lui et ses successeurs . Les seigneurs de la vicomté d'Aumelas cherchèrent à se Soustraire à la juridiction du gouverneur de Montpellier, sous prétexte qu'ils tenaient dans leurs châteaux des juges d'appel. Ils furent contraints à le reconnaître comme leur juge dans les cas de supériorité et de ressort, c'est-à-dire à contester devant lui, lorsqu'on faisait appel de la sentence de leurs juges le parlement de Paris était intervenu. Racontons les faits. Le seigneur de Paulhan, Raymond de Veyrac, refusa, en 1388, de déférer à un appel interjeté contre lui devant la Justice de Montpellier. Il alla plus loin il maltraita le sergent qui était venu pour l'ajourner à comparaître en la cour de palais, lui ôta sa commission et le fit jeter en prison. Il fit appel ensuite au parlement. Or, tant dans la Baronnie de Montpellier que dans la Vicomté d'Aumelas, il y avait d'autres seigneurs qui marchaient sur ses traces. Instruit de cette résistance par le procureur du Roi, et persuadé par lui que Paulhan, ainsi que les autres lieux, relevaient de Montpellier, comme faisant partie de la Vicomté d'Aumelas, le parlement donna ordre au sénéchal de Beaucaire de forcer le sieur de Veyrac et les autres seigneurs à se soumettre à la juridiction du gouverneur, aux mains duquel il mit toutes provisions pour les y contraindre, Si besoin était, même par la force et nonobstant opposition, 17 novembre. Le château de Paulhan, en particulier, prétendait ne pas faire partie de la Vicomté, dont tous les lieux, on l'a vu dans l'Estimation de 1374, devaient reconnaître la supériorité du juge de Montpellier . Le projet de la construction des murailles de Vendémian, qui fut autorisé par le seigneur Arnaud de Roquefeuil, en 1389, nous fournit l'occasion de nous rendre compte de ces fortifications, dont chaque localité aimait à s'entourer pendant le moyen-âge, et dont on attendait les plus grands services. Les habitants, convoqués par le baïle sur la place publique, exposèrent à Messire Arnaud, leur seigneur, que par diverses fois la communauté avait reçu plusieurs graves mauvais traitements, par défaut d'avoir pu entourer le lieu de murailles; que même ledit lieu avait été souventes fois ruiné et saccagé par la guerre qui avait duré longtemps dans la contrée, et que leurs meubles et leurs bestiaux étaient souventes fois pillés par des attroupements de voleurs et d'autres vagabonds . Ils supplièrent ensuite le seigneur de leur permettre, de grâce spéciale, de servir ledit lieu de murailles d'après la méthode suivante, à savoir, que 1° la terre qui se trouvera à l'en-tour des murailles et barbacanes, rue et fossés, sera franche et libre de toutes tailles et censives, et que l'on procédera à la division des chazeaux, du carême prochain en un an; lesquels chazeaux demeureront quittes et exempts de tout paiement, remise et cens, etc. ; 2° que les maisons, qui sont dans l'ancienne forteresse, paieront leurs cens et devoirs accoutumés; 3° que les syndics pourront ordonner de nouvelles rues; 4° que, chaque an-née,... les nouveaux syndics commettront pour garder les clés des portes deux personnes, qui seront tenues de rendre compte au baïle; 5° que pourront les habitants faire des fenêtres qui ne regardent que le dedans de la forteresse; 6° que les syndics, après avoir achevé la murraille, pourront muer et changer la tour qui est dans la place vieille et faire des barbacanes aux murs, ainsi que bon leur semblera, établir des ponts-levis, et utiliser celui du portail de l'ancienne forteresse; 7° que tout ce qui sera trouvé et proviendra des anciens lieux, appartiendra à la communauté; 8° enfin, que les seigneurs ne pourront imposer sur les caves aucun ban, ni demander autre chose, Si ce n'est que les syndics disposent de tout " pour l'intérêt de la communauté ". La demande ayant été favorablement accueillie, quatre habitants eurent tous les pouvoirs nécessaires pour ceindre de murailles ladite forteresse,.. allouer et colloquer tous et chacuns des habitants dans la forteresse, tant ancienne que nouvelle, en des lieux convenables pour chaque chef de maison, lesquels ils leur bailleraient avec ou sans paiement .... abattre les maisons qui sont hors de l'ancienne forteresse;… construire un four à la communauté...; contraindre les habitants à exécuter, payer et contribuer pour ladite oeuvre et imposer les tailles, etc. Le sieur de Blanquefort Jean, écuyer, gendre d'Arnaud, figura dans cette circonstance comme lieutenant du seigneur de Vendémian, et Pierre Guitard, seigneur de Lestang, comme témoin. Un détail à signaler qui prouve jusqu'où allait le souci de l'intérêt commun, pour ne pas dire la méfiance des villageois il avait été stipulé que, lorsque le seigneur se rendrait à Vendémian, on devait lui apporter les clés de la porte du lieu, sans ajouter qu'elles seraient rendues. Les syndics obligèrent le sieur de Blanquefort à déclarer par écrit que le seigneur ou son lieutenant les remettraient aux hommes chargés de les garder, sur la simple réquisition de ceux-ci. La famille d'Arpajon, originaire de Rouergue, fit, vers ce temps, l'acquisition de Belarga, Plaissan et Adissan. Les d'Arpajon remontent pour le moins au Xllle siècle. L'His£oire de Languedoc les mentionne comme possédant une seigneurie en Auvergne, en 1249; elle montre Hugues d'Arpajon à la suite du roi Philippe-le-Hardi contre le comte de Foix en 1272; elle parle de Bêrenger d'Arpajon adhérant, avec les États du Languedoc assemblés à Montpellier, à l'appel fait par Philippe-le-Bel contre l'excommunication prononcée à son endroit par le pape Boniface VIII, en 1303; elle parle aussi de noble Bernard d'Arpajon, qui prêta serment de fidélité au comte de Toulouse, en 1249, et fui jeté en prison, en 1260, par l'évêque Vivien de Rhodez. Hugues d'Arpajon, vicomte de Lautrec, acheta, dans la seconde moitié du XIVe siècle, le lieu de Belarga à Bêrenger de Clermont qui avait succédé à Pierre, son père. Pierre, fils d'Ayméry, possédait Belarga en 1301. En 1310, pour avoir fait violence à la damoiselle Fize, fille noble de PuyLacher qu'il avait emprisonnée dans son château, ce dernier fut condamné par le sénéchal de Carcassonne à des amendes envers le roi ct envers sa victime, et sa terre fut saisie jusqu'â ce qu'il les eut entièrement payées . Les seigneuries de Plaissan et d'Adissan, fiefs de la Baronnie du Pouget, furent vendues au susdit Hugues d'Arpajon par Jean de Narbonne, en 1384. Aussi, dans son recensement de 1389, il déclarait posséder, "en la sénéchaussée de Carcassonne, le lieu de Belesgards avec toute la juridiction, le passage ou port de la barque dud. lieu qui valait, un an l'autre, 10 francs d'or ou environ ; une rente annuelle sur les habitants de quatre charges d'huile et un cens d'environ 25 sétiers de blé chaque année ". Il reconnut encore qu'il retirait de Plaissan, où il avait pleine et entière juridiction, une rente annuelle d'environ 20 sétiers de blé, et qu'Adissan, joui dans les mêmes conditions, lui procurait un égal revenu. Il fit, en même temps,hommage 1° pour un moulin situé à Lautrec, lui rapportant chaque année 40 sétiers de blé, 2° pour un bois de 200 sétérées sis au lieu de Montaut1 et 3° pour 26 liv. tourn. de cens que lui faisait le consulat de Lautrec. En ce moment, la Baronnie du Pouget était sous le séquestre: Amaud de Roquefeuil avait négligé de faire au Roi son hommage. Les habitants du Pouget profitèrent de cette circonstance pour lui refuser le serment de fidélité. Un souffle d'indépendance était passé sur la Baronnie jusqu'alors calme et soumise. Arnaud de Roquefeuil eut à lutter contre ses vassaux pendant les dernières années de sa vie. Mais cela ne doit pas étonner, car partout les communautés rurales, éprouvant le besoin d'une plus grande liberté, faisaient des efforts pour se soustraire à la domination des seigneurs. Favorisées par la monarchie, qui n' avait qu'un but, abattre la féodalité pour tout ramener àsoi, elles formaient des syndicats, réclamaient toujours de nouvelles franchises, contestaient le droit féodal; et quand le juge du seigneur les avait condamnées, elles recouraient au gouverneur, toujours disposé à les soutenir. Pour n'avoir pas à obéir à son seigneur, Pauihan prétendait qu'il n'avait d'autre maître ou seigneur que le Roi. Les gens du Pouget, de leur côté, refusèrent de faire les reconnaissances féodales depuis le moment de la saisie de la Baronnie, prétextant que " ni le Pouget, ni les autres villes de la Baronnie ne devaient l'hommage au sieur de Roquefeuil, parce que les desçendants des rois de Majorque sont nos seigneurs, étant leurs légitimes successeurs et héritiers. Et même, ajoutaient-ils, il n'apparaît pas par Lettres-patentes de Sa Majesté le roi de France, qui a mis sous sa main depuis quelque temps la Baronnie, comme ledit seigneur de Roquefeuil est seigneur et baron du Pouget, 1394 ". Cette façon de parler fait voir l'attachement que l'on conservait pour les princes espagnols dont l'administration aurait été, sinon plus paternelle, du moins plus tolérante que celle du sieur de Roquefeuil. L'hommage qu'exigeaient les lois fut cependant rendu par le Baron du Pouget, qui déposa son recensement entre les mains du sénéchal de Carcassonne; mais ses sujets n'en persistèrent pas moins dans leur insubordination. Le baïle prononça contre eux diverses condamnations; ils firent appel auprès du gouverneur, qui se déclara pour eux et envoya ses officiers instrumenter au Pouget contre le seigneur. Arnaud porta l'affaire an parlement de Paris. L'affaire était pendante en la haute Cour depuis longtemps, et les tiraillements persistaient au Pouget. Tout-à-coup, sous le prétexte qu'un jour, quondam, le balle du Seigncur aurait eu l'audace de fermer les portes du lieu à ses officiers, se serait rebellé contre l'avocat Clavel et aurait commis d'autres excès, le gouverneur fit saisir le Pouget, sa juridiction et ses revenus, pour les placer sous la main du Roi. il destitua les officiers du sieur de Roquefeuil pour en établir d'autres, et il occasionna à ce seigneur les plus grands chagrins en le molestant d'une infinité de manières. Devant cès indignes traitements, le Baron insista auprès du Prince et de sa cour de parlement. Bientôt le juge de Gignac reçut l'ordre de remettre le sieur Baron en possession du Pouget; mais voilà qu'il se heurta au mauvais vouloir du gouverneur, qui par ses discours et par ses menaces l'empêcha de remplir son devoir. Pendant ce temps, il se forma, sous l'inspiration du gouverneur, un syndicat, qui avait pour mission de défendre les habitants devant le parlement, mais dont le but était de prendre lui-même la direction des affaires du lieu. Analysons les pouvoirs qui furent conférés aux syndics. Les syndics eurent le mandat de forcer le seigneur de Lestang à payer les tailles pour ses biens situés dans le terroir du Pouget et à conserver à la communauté les franchises dont elle jouissait à Lestang et autres lieux. Ils pouvaient, pour l'avantage de la population, vendre une partie des revenus du pays. Ils avaient mission pour nommer les caritadiers (directeurs de la Charité), les ouvriers (marguilliers), les bandiers, les visiteurs du poisson, de la viande et du pain livrés à la consommation. Sauf les ouvriers, tous les autres officiers devaient prêter, devant le baile, le serment de bien remplir leurs charges. Les mesures des courtiers en vin, huile, etc., étaient soumises au contrôle des syndics. Le soin des murailles, qui avaient élé cédées aux habitants par le seigneur, en 1387, des chemins publics, des fontaines, des puits, des cymbales et cloches de l'église leur était également confié. C'est à eux qu'il incombait de soutenir les procès de la communauté et de choisir ses procureurs. Quant aux tailles, ils devaient en fixer le montant, avec le concours du conseil politique et celui de quinze contribuables des plus imposés, tant de la localité qu'étrangers. au lieu. Ils étaient chargés de fournir les rôles aux colleçteurs des tailles qui étaient imposées sur les biens, même sur ceux du clergé. Les syndics devaient aussi prêter la main à ce que les usages fussent remis au seigneur, et veiller à ce que le clergé ne pût actionner personne en dehors de la juridictIon du lieu. Enfin ils étaient investis de tout pouvoir et de toute faculté pour défendre le village en la cour de parlement contre le sieur de Roquefeuil. Le susdit syndicat fut formé, en 1395, par devant M. Pierre de Craizines, notaire royal . Arnaud de Roquefeuil mourut, la même année, sans avoir recouvré ni ses biens, ni ses droits, dans la Baronnie du Pouget. ll avait institué pour lui succéder, à titre d'héritière,sa fille Catherine, épouse de Blanquefort. Pour compléter l'histoire de ce vaillant homme, nous devons rapporter certains détails qui tournent à sa gloire. Arnaud fut choisi par le roi Jean, comme ambassadeur à la cour du roi d'Aragon, pour paralyser les efforts que le roi de Navarre faisait auprès de ce prince afin de l'engager dans la guerre contre la France, 1351. On comptait sur lui, en 1356, pour former une somme importante en vue du mariage du comte d'Anjou avec l'infante Jeanne d'Aragon; il se trouvait, en ce moment, occupé à combattre les Anglais dans le Rouergue. En 1361, le sénéchal de Carcassonne le nomma, à la demande des consuls de Montpellier, " capitaine de cette ville, pour la gouverner, défendre et fortifier contre les Compagnies qui couraient à travers le Languedoc ". (H. G. L., t. VII passim). Arnaud de Roquefeuil a donné les plus grandes preuves de sa valeur sur les champs de bataille, comme aussi de sa sagesse dans des affaires importantes. Ce noble chevalier est une des gloires de la terre de Pouget; son image devrait orner une des places du chef-lieu de cette ancienne Baronnie.
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